Lorsque vous dépensez plus que vous ne gagnez, vous créez une dette. Pour la financer, vous empruntez auprès de votre banque, de vos proches, d’un établissement spécialisé dans les crédits… ou bien de tous à la fois. Le principe étant bien évidemment de rembourser ! La dette publique de la France correspond exactement à la même situation. Pour la financer, la France emprunte pour pallier le déficit public. Et la France est mauvaise élève de la maîtrise budgétaire : elle figure parmi les pays les plus endettés d’Europe. Quel est le montant de la dette publique en France ? Comment a-t-elle évolué ces dernières années et jusqu’où peut-elle aller ? L’Académie AuCOFFRE vous dit tout.
À combien se monte la dette publique de la France en 2023 ?
Commençons par les chiffres qui fâchent : le montant de la dette publique du pays. Fin 2022, la dette française a atteint 2 956,8 milliards d’euros, selon les chiffres de l’INSEE. Elle comprend l’ensemble des déficits des administrations publiques : l’État, l’administration centrale, les collectivités locales et les administrations de sécurité sociale. Cette dette (aussi appelée « dette au sens de Maastricht » ou dette publique notifiée) représente 111,6 % du PIB (produit intérieur brut).
Début 2023, elle frôle les 3 000 milliards d’euros. La question, dans les prochains mois, va être de savoir si le pays dépasse ce seuil ou si la collecte fiscale des entreprises (et donc des recettes de l’État) liée à l’inflation permet de limiter la hausse.
Comment a évolué la dette française dans l’histoire ?
Sur les 40 dernières années, les graphiques montrent des chiffres qui n’ont fait qu’augmenter. Entre 1980 et 1997 par exemple, le montant de la dette française est passé de 589 à 4 727 milliards de francs. Sur la même période, le ratio d’endettement est passé de 21 à 58,1 % du PIB.
Cette augmentation est logique puisque la dette se cumule. Le principe d’un emprunt est de pouvoir le rembourser peu à peu, mais il faut aussi payer les intérêts. Pour l’Etat, cela représente 40 milliards en moyenne chaque année. Petit à petit, le fardeau s’alourdit. La dette française a aussi connu une forte augmentation depuis 2020 : la pandémie a imposé un important effort financier de l’État (le “quoi qu’il en coûte”). Il y a eu ensuite une hausse des taux d’intérêts provoquée par l’inflation à partir de 2022.
- En 2019, la dette publique de la France atteignait 97,4 % du PIB (2 374,9 milliards d’euros) : elle a largement dépassé un seuil en 2020 lorsqu’elle a atteint 114,6 % du PIB (2 657,4 milliards d’euros).
- Fin 2022, le pourcentage du PIB atteint 111,6 % : cela semble mieux que le record à 114,6 %. Mais il ne faut pas oublier que le PIB a aussi augmenté en 2022.
Source graphique : https://www.insee.fr/fr/statistiques/6678112#graphique-dette-g1-fr
Bon à savoir : En avril 2023, l’agence de notation financière internationale Fitch a abaissé la note de la France d’un cran à AA-, en raison de perspectives de croissance moins élevées qu’attendues, des mouvements sociaux dans le cadre de la réforme de la retraite et de déficits budgétaires importants. Fitch est l’une des trois organismes de notation financière référents, avec les agences américaines Standard & Poor’s et Moody’s.
Qui possède la dette française ?
Selon les chiffres de l’Agence France Trésor (AFT), qui gère la dette française, elle est répartie pratiquement à parts égales entre des investisseurs et des banques résidents et non-résidents. Le terme résident fait référence aux personnes morales ou physiques, dont le domicile ou l’établissement principal sont situés en France. Ainsi, fin 2022, 50,1 % de la dette était détenue par des investisseurs et établissements bancaires non-résidents. La Banque centrale fait aussi partie des créanciers de l’État.
Jusqu’à quel point la dette française peut-elle se creuser ?
En 2023, la France va emprunter 270 milliards d’euros : le chiffre, un record, a été confirmé en décembre 2022 par l’AFT. Pour un emprunt de 270 milliards d’euros, les intérêts qui s’y ajoutent se montent à près de 8 milliards. La dette va donc continuer à se creuser, d’autant plus que depuis janvier 2022, les taux d’intérêt ont été remontés. Nous sommes désormais loin d’un taux quasiment négatif, ce qui était le cas avant 2020, et cela contribue à augmenter le coût de la dette publique.
En avril 2023, le ministre de l’Économie et des Finances et le ministre délégué chargé des comptes publics ont présenté un programme de stabilité 2023-2027 (PSTAB) qui vise à réduire le déficit public.
La France est-elle le seul pays à être endetté ?
La France est l’un des pays les plus endettés d’Europe… mais elle est loin d’être la seule puissance économique à faire office de mauvais élève.
D’autres pays sont (beaucoup) plus endettés que la France
En Europe, la Grèce présente le plus fort taux d’endettement : 171,3 % du PIB. Le pays est suivi par l’Italie (144,4 %). Mais d’autres sont bons élèves : la Bulgarie avec 22,9 %, le Luxembourg avec 24,6 % ou encore la Suède avec 33 %.
Le cas des États-Unis est régulièrement évoqué chaque année dans les médias, à mesure que s’approche le plafond de la dette publique autorisé par le Congrès. Ce plafond d’endettement est fixé à environ 29 000 milliards d’euros (31 381 milliards de dollars). La dette publique américaine représentait 126,4 % du PIB en 2021.
Au Japon, la dette atteint 8 800 milliards d’euros et elle est équivalente à 250 % du PIB. Mais, paradoxalement, ce n’est pas un sujet qui préoccupe les Japonais : le recours à l’endettement est nécessaire pour soutenir l’économie et financer la dépense sociale, au sein d’une population vieillissante.
Annuler la dette publique : est-ce possible ?
Peut-on effacer la dette publique ? La question se pose et en 2021, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, y avait répondu : c’est « inenvisageable » (source). Cette annulation des dettes publiques au sein de la zone euro irait à l’encontre « du traité européen qui interdit strictement le financement monétaire des États ». Sa réponse intervenait avant le début du conflit en Ukraine et avant le contexte inflationniste. Il ne faut pas non plus oublier qu’une partie de la dette est détenue par les Banques centrales nationales, dont la Banque de France pour la dette publique française. Refuser de rembourser son créancier signifierait alors ne pas rembourser la Banque de France. Une annulation de la dette reviendrait aussi à faire fuir d’éventuels nouveaux créanciers au moment d’emprunter de nouveau.
Pourquoi la dette publique nous concerne directement ?
Vous l’avez compris, la dette publique représente l’ensemble des emprunts de l’État, de l’administration française ou encore de la Sécurité sociale. Il s’agit donc de l’argent qui permet aux administrations du pays de continuer à fonctionner. Et lorsqu’il est question de surendettement, la situation peut effrayer. Dans le cas d’un ménage lambda, il existe des risques : voir arriver un huissier à sa porte, être placé en situation d’interdit bancaire… Les risques ne sont évidemment pas les mêmes pour un État.
Néanmoins, un endettement élevé peut pousser les créanciers à négocier des taux d’emprunt plus élevés par exemple. Cela peut avoir des conséquences très concrètes sur les revenus des Français. Pour réduire la dette publique, il faut de la croissance mais si elle n’est pas au rendez-vous, les dirigeants vont jouer sur plusieurs leviers :
- Diminuer la dépense publique (les services de l’État) donc réduire l’offre de services publics (moins de santé, moins de police, moins de justice, etc.) ;
- Augmenter les recettes donc les impôts des entreprises et des particuliers ;
- Augmenter les cotisations sociales ;
- Et enfin, on l’a vu en 2023, retarder l’âge de départ à la retraite.
Ces leviers ont pour conséquence directe de diminuer le pouvoir d’achat des citoyens. Et c’est pour cela que la dette publique concerne les Français au quotidien…